samedi 7 décembre 2013

Le Pendu de la Porte Saint-Martin par Christine Matéos : le polar-feuilleton à suivre

Découvrez Le Pendu de la Porte Saint-Martin un roman policier qui se présente sous la forme d'un blog-feuilletons. Vous pouvez interagir avec l'auteur, Christine Matéos qui publie un nouvel épisode chaque dimanche ... et découvrir que certains de vos commentaires ont été intégrés à l'intrigue.
Le chapitre 9 est en-cours d'écriture, pour notre part, nous vous offrons un retour au début et chaque samedi nous vous dévoilerons un nouveau chapitre.

Le mot de l'auteur : « Au XIXème siècle, les journaux avaient leurs feuilletons. Au XXIème siècle, nous avons les blogs, alors pourquoi pas un "blog-feuilleton" ? Je vous propose de suivre cette histoire, qui se déroule en 1830, pour l'essentiel dans un théâtre parisien, mais dont tous les personnages sont imaginaires. Mieux que les lecteurs du XIXème siècle, vous pourrez, en publiant des commentaires, faire savoir ce que vous en pensez au fur et à mesure, et, pourquoi pas, influer sur le fil de l'histoire...»

Prologue

Le jeune homme regardait droit devant lui sans rien dire, la mâchoire crispée, les poings serrés enfoncés dans ses poches. L’image qu’il avait devant les yeux était la même depuis des mois. Pourtant, elle était toujours aussi précise et revenait le hanter à chaque instant de repos: le corps de sa sœur, Adélaïde, sa douce Adélaïde, suspendu à une corde, qui se balançait faiblement dans la pièce sombre.
Il était resté de longues minutes pétrifié par ce spectacle, sans comprendre tout de suite ce qu'il voyait. Puis, la conscience de la réalité l'avait assailli par vagues et l'avait submergé. De toutes ses forces, il s'était cramponné à l'idée qu'elle s'était rompu les cervicales dès qu'elle était tombée du tabouret. Une mort instantanée et indolore. C'était moins insupportable que d'imaginer la strangulation, son corps se débattant au bout de la corde avant de lâcher prise dans un ultime soubresaut. Cette évocation l'avait fait suffoquer lui même et il l'avait repoussée aussitôt. Adélaïde était fragile et délicate, sa nuque fine n'avait pas pu résister à la morsure de la corde, au choc de la chute dans le vide. Il aurait pu en avoir la confirmation en examinant son visage, mais cela avait été au dessus de ses forces. Les cheveux dénoués de la jeune fille pendaient en longues mèches devant ses yeux et la masquaient presque complètement. Il avait lentement baissé les yeux le long du corps de sa sœur. Sur son corsage, il avait remarqué une petite déchirure, comme s'il y avait eu là un ornement qui avait été arraché. Sa robe semblait flotter autour d'elle; elle avait sans doute récemment maigri. Son pied gauche était nu, son bas de laine grise avait glissé et gisait juste en dessous d'elle. Benjamin pensa avec un serrement au cœur que cette allure négligée ne lui ressemblait pas.
Pas très loin de ses pieds, il y avait le tabouret renversé, et sur la table, à côté de ses affaires de toilette, une petite broche en or, représentant une fleur avec un cœur de rubis. Le bijou précieux détonait dans cette pièce où tout proclamait le dénuement extrême dans lequel avait vécu la jeune fille ces derniers mois. Le mobilier, plus que rudimentaire, était réduit au strict minimum : une paillasse en guise de lit, la table carrée du même bois brut que le tabouret, aux angles arrondis par l'usure, une petite malle en osier, un vieux poêle à charbon qui devait enfumer la pièce en hiver, et même pas de rideau à la minuscule fenêtre.
Dans cet écrin de misère, l’or de la broche étincelait comme une insulte. Ses pétales étaient déformés et l’épingle était tordue, comme si la broche avait été écrasée. La main d’Adélaïde était écorchée. Elle ne s'était pas contentée de l'arracher de son corsage. S’était-elle acharnée dessus juste avant de monter sur le tabouret ? Le désespoir l’avait pourtant emporté sur la colère.
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